Black Friday 2025 : Entre résignation et résistance, les détaillants indépendants partagent leurs ressentis et bonnes pratiques
Un peu plus de 50 % des détaillants indépendants de la mode participent au Black Friday, qui débute officiellement ce vendredi 28 novembre. Même si dans les faits, les promotions ont déjà débuté depuis plusieurs jours pour de nombreuses enseignes… Face à ce phénomène, les indépendants adaptent leurs pratiques, entre résignation, résistance mais aussi un peu d’innovation ! Reportage.

Les détaillants indépendants français doivent-ils participer au Black Friday ? Ou à l’inverse le boycotter ? Le débat est animé chez les professionnels. « Aujourd’hui, j’ai l’impression que l’on on n’a plus vraiment d’alternative. Même les clientes qui ont du pouvoir d’achat font beaucoup plus attention aux prix et guettent les bonnes affaires. Dans ma situation, il m’est impossible d’ignorer le Black Friday alors que toutes les enseignes autour de mon magasin martèlent déjà leur communication depuis plus de deux semaines. Mais, pour être honnête, j’aurais préféré ne pas avoir à proposer des remises à cette période de l’année ». Le témoignage de Nadia, à la tête d’une boutique de prêt-à-porter et accessoires féminin, à Montpellier, résonne aujourd’hui chez de nombreux détaillants mode partout en France.
« En échangeant avec les commerçants du quartier, on fait tous le même constat : ces derniers jours, la fréquentation est très calme. Beaucoup de clients attendent clairement le Black Friday, en se disant que c’est le bon moment pour commencer leurs achats de Noël. Pour marquer le coup, j’ai choisi de proposer des remises allant de – 10 % sur les nouvelles collections, jusqu’à – 50 % sur certaines pièces de fin de série. On verra bien si cela porte ses fruits », explique de son côté Sylvain, gérant d’une boutique de mode masculine, à Toulon.
Un peu plus de 50 % des détaillants indépendants comptent proposer des remises à l’occasion du Black Friday
Les résultats de la consultation menée par la rédaction de Boutique2Mode, et à laquelle 1 633 détaillants indépendants de la mode ont participé, tous secteurs confondus (prêt-à-porter, chaussure, lingerie, accessoires, maroquinerie…), montre ainsi qu’un peu plus de 50 % des commerçants proposent des remises à l’occasion de cette édition 2025 du Black Friday.
Un chiffre en hausse de 10 points par rapport à la consultation menée en 2024, même si dans cet ensemble, une majorité de commerçants souhaitent limiter la portée de l’évènement. A l’instar de Sarah, gérante d’une boutique de prêt-à-porter féminin, à Angers. « Par respect pour ma clientèle, je ne proposerais que des remises sur les collections les plus anciennes. Je me dis que c’est l’occasion de déstocker le maximum de pièces que je n’avais pas réussi à vendre lors de la précédente période de soldes », témoigne-t-elle.

A l’inverse, près d’un détaillant sur deux continuera toujours à ne pas faire de promotion en magasin à partir du 28 novembre. C’est le cas notamment de Tina, gérante d’une boutique de lingerie, à Dunkerque. « Je ne participe pas, parce que pour moi cette opération n’a aucun sens. Comment justifier à une cliente qui est passée la veille, ou qui viendra la semaine d’après, qu’elle paie un prix différent ? Et comment ne pas dévaloriser mes produits en les bradant juste avant les fêtes, qui sont le seul moment de l’hiver où l’on arrive à faire un chiffre correct avec une marge convenable ? Je préfère expliquer à ma clientèle que ce type de pratique ne correspond ni à mes valeurs, ni à la qualité des articles que je propose ».
Ou encore de Claire, gérante d’une boutique de chaussure homme/femme, à Valence. « Chacun gère les choses à sa manière. Pour ma part, je travaille avec une clientèle locale, qui connaît mes produits, fait confiance à ma sélection et à notre expertise en magasin. Bien sûr, je pourrais sans doute générer plus de chiffre d’affaires ce week-end en accordant des remises, mais entre l’énergie à investir dans la communication et la perte de marge, je n’en vois pas l’intérêt. Je préfère créer mes temps forts et proposer des offres selon mon propre calendrier », explique-t-elle. Et ce malgré les demandes de certains clients.
Près de 20 % des répondants au sondage affirment ainsi recevoir « souvent » des demandes de remise en perspective du Black Friday (voir détail des votes ci-dessous). « Samedi dernier, une cliente intéressée par un sac à main m’a demandé si elle pouvait le mettre de côté en attendant le Black Friday. Je lui ai expliqué que je ne ferais aucune remise sur le week-end du 28 novembre. Finalement, elle l’a acheté tout de suite, de peur qu’il ne soit vendu entre temps », raconte ainsi Élodie, qui tient une boutique de prêt-à-porter et accessoires, à Besançon.

Les commerçants français peu enthousiastes dans l’ensemble du Black Friday
Qu’ils participent ou non à cette édition 2025 du Black Friday, une chose est certaine, moins d’un tiers des détaillants indépendants estiment qu’il s’agit d’une « opportunité de ventes supplémentaires », quand seulement 8 % des professionnels interrogés considèrent que le Black Friday représente une « opération commerciale intéressante ».
A l’inverse, une majorité de commerçants interrogés estiment que le Black Friday conduit à une « perte de repères en termes de prix », ou encore « une perte de marge ou in fine une baisse des ventes ». « Pour moi, le Black Friday n’a aucun sens quand on pratique déjà des prix justes. D’autant que je peux proposer toutes les remises que je veux, si un client ne regarde que le prix, je ne pourrai jamais rivaliser avec les géants de la fast fashion. On le voit bien aujourd’hui avec Shein, même les grandes enseignes ne peuvent pas lutter ! Dans ma boutique, j’ai fait le choix de défendre la valeur des produits, leur style, leur qualité et leur fabrication plus responsable. Je milite au quotidien pour une consommation raisonnée, qui privilégie la durabilité… Autant dire qu’avec le Black Friday, on est complètement à contre-courant de cela », souligne Hervé, commerçant en mode éthique, à Bayonne.


Quelles alternatives au Black Friday ?
Dans ce contexte, d’autres commerçants veulent aussi profiter du Black Friday pour communiquer différemment, et même organiser des évènements en boutique, mais sans promotions. « Comme c’est un week-end où il y aura forcément plus de trafic en centre-ville, je me suis dit que c’était le moment idéal pour organiser une soirée en boutique, ce samedi. Un ami s’occupe de l’ambiance musicale, et pour le buffet j’ai fait appel au traiteur du quartier qui, comme on se connaît bien, m’a fait un bon prix, raconte Julien, gérant d’un concept store à Reims. On a déjà plus de 30 réservations. Ce sera l’occasion de revoir des clientes et des clients qui ne sont pas passés depuis un moment, de partager un moment convivial… et peut-être, avec un peu de chance, de faire aussi quelques ventes ! »
Avec un budget plus serré, mais toujours dans l’esprit de valoriser sa clientèle, Laura, détaillante en chaussures pour femme à Rennes, a choisi quant à elle d’offrir des bons d’achat allant de 5 à 50 euros, en fonction du montant dépensé, mais uniquement aux clientes ayant réalisé au moins quatre achats dans sa boutique au cours des deux dernières années. « J’avais vraiment envie de remercier celles qui commandent régulièrement chez moi, que ce soit en boutique ou sur le site. J’ai donc décidé d’envoyer à mes meilleures clientes, environ une soixantaine, des bons d’achat avec des montants adaptés à ce qu’elles ont dépensé. Côté communication, comme l’offre était ciblée, j’ai commencé par un emailing, puis j’ai relancé avec une campagne SMS quelques jours plus tard. Ça demande du temps et un petit budget, bien sûr, mais en contrepartie je ne fais aucune promotion en magasin. Pour celles qui viendront avec leur bon, c’est un signal fort, elles savent qu’elles comptent vraiment », explique-t-elle.
Lire aussi : Détaillants mode : Quel positionnement choisir pour faire venir les clients en boutique ?
Une démarche qui illustre parfaitement ce que rappelle Valentine Tapia, formatrice en stratégie commerciale et marketing chez Solutions Boutiques : « Même avec un budget limité, les petits commerçants peuvent s’approprier le Black Friday en jouant sur leur singularité et la relation de proximité qu’ils entretiennent avec leurs clients. En concentrant leurs efforts sur des actions simples et ciblées, ils ont ainsi la possibilité de profiter de l’événement sans sacrifier leurs marges ni leurs valeurs ». Une pratique qu’elle détaille et encourage dans l’article Black Friday : Avantages, inconvénients et alternatives pour les petits commerçants.
En s’appropriant le Black Friday à leur façon, certains commerçants indépendants montrent qu’il est possible de transformer cette opération commerciale en levier de différenciation. Promotions ciblées, temps forts relationnels, valorisation du savoir-faire : autant d’initiatives inspirantes pour renforcer le lien client et affirmer l’identité de son commerce. Une source d’inspiration précieuse, à l’heure où les consommateurs plébiscitent l’authenticité et la proximité.


Black Friday 2025 : entre résignation et résistance, les commerçants indépendants s’adaptent - L'echommerces
25 novembre 2025 @ 9 h 59 min
[…] rester en marge de l’événement. C’est en tout cas ce qui ressort de la dernière consultation menée par le magazine professionnel Boutique2Mode (notre média partenaire), auprès de 1 633 détaillants indépendants de la mode, tous secteurs […]