Des boutiques plus attractives à LED d’ampoules ?
En boutique, l’éclairage est souvent le parent pauvre du merchandising. C’est dommage car, bien utilisée, la lumière est un outil puissant pour vendre. Mais il faut se montrer subtil dans son utilisation, loin de la surexposition des hypermarchés et de l’obscurité de certaines vieilles échoppes…
« Mon métier, c’est de permettre à une boutique de gagner plus d’argent » affirme Olivier Fronton, fondateur de Light in shop. Et il a raison : pour accrocher les passants dans la rue, pour mettre en valeur les produits et déclencher l’acte d’achat, souvent impulsif, l’éclairage d’un magasin joue un grand rôle. Pourtant, regrette Béatrice Querette, directrice de l’agence Merchanfeeling, « le poste éclairage se retrouve trop fréquemment en queue de budget.» Il est vrai que la culture lumière des détaillants se limite souvent à la notion de watt, soit la « puissance électrique consommée » par les ampoules… Pour une boutique, il faudrait parler lux (l’intensité lumineuse), température de couleur et IRC (l’indice de rendu des couleurs). Et, pour concevoir une installation commercialement efficace, s’en remettre à un éclairagiste plutôt qu’à un électricien. « Aujourd’hui, les possibilités esthétiques et techniques se sont multipliées. Les détaillants doivent être guidés dans leurs choix », précise Béatrice Querette.
Donner du rythme
Comme au théâtre ou dans certains musées, éclairer une boutique, c’est faire une mise en scène. Premier principe : créer un rythme, en jouant sur le contraste entre des zones lumineuses, où sont exposés les produits (en prenant garde de ne pas éblouir les clients) et d’autres plus sombres, comme les allées. « Nous ne sommes pas là pour vendre du carrelage » plaisante Olivier Fronton. «Pour que l’effet soit perceptible, explique Olivier Bourdeaux, chef des ventes chez Velum, il faut doubler ou tripler la quantité de lumière d’une zone à une autre. Si le pourtour d’une boutique est à 1200 lux, le fond sera à 2500 lux et la vitrine à 4000 ou 5000 lux.» D’où la multiplication des points lumineux, générés par autant d’éclairages directionnels, autrefois apanages des boutiques de luxe. Exemple extrême de cette tendance clair-obscur : la boutique parisienne Abercrombie & Fitch, ouverte en mai 2011. Les clients y évoluent dans la pénombre, l’éclairage étant réservé à certains articles, dans une ambiance musicale très forte qui rapproche l’ensemble d’une discothèque. Le succès est là mais le « ténébrisme » a ses limites : « les plus de 20 ans sont assez mal à l’aise quand le niveau d’éclairage est trop bas. C’est un frein à l’achat ! » prévient Olivier Bourdeaux. Mieux vaut donc s’inspirer des boutiques Desigual (photo), pour l’univers chatoyant qu’elles ont su créer, en adéquation avec leurs vêtements tout en couleurs.
Créer du mouvement.
Grâce aux leds, l’éclairage en boutique n’est plus figé. Il est possible de réaliser des mouvements de lumières, en façade, en vitrine mais aussi à l’intérieur du point de vente, pour indiquer un sens à la visite, par exemple. Mais en dehors d’évènements particuliers, comme Noël, l’original risque vite de tendre vers l’ordinaire ! La bonne idée, c’est plutôt « de changer la couleur de certains éclairages, avec des variations lentes pour ne pas gêner les clients mais qui vont attirer l’attention sur un présentoir ou un rayon » suggère Ludovic Labidurie, le PDG de Neolux. « On peut renouveler l’intérêt pour une vitrine simplement parce que l’éclairage nocturne évoluera d’une semaine à une autre, sans toucher aux mannequins ou à la PLV » avance Marc Dumas, directeur d’Euro Lighting. Pour le confort des clients, l’éclairage peut aussi être modulé selon les heures de la journée, de la même manière que certaines boutiques alternent musiques douces et plus rythmées. La lumière blanche elle-même peut varier : « avec une même led, selon les articles, le détaillant peut opter pour un blanc chaud ou un blanc froid, explique Ludovic Labidurie. Nous avons également travaillé sur une cabine d’essayage permettant au client de simuler les conditions d’utilisation du vêtement : en intérieur ou à la lumière du jour.»
Led : oui, mais…
Pour les professionnels, le débat est clos : les leds surclassent les ampoules à iodure métallique. Deux boutiques parisiennes Mellow Yellow les ont ainsi adoptées car elles ne chauffent pas : « En vitrine, les spots brûlaient les cuirs et dans les magasins, employés et clients étaient incommodés par la chaleur des ampoules, car les plafonds étaient assez bas » explique Fabien Guillochon, ingénieur commercial chez Lucibel. Les leds génèrent aussi des économies sur la consommation électrique pour l’éclairage (divisée par six) et la climatisation, ainsi que sur la maintenance (leur durée de vie est vingt fois supérieure). Techniquement, il ne manque encore que des leds de forte puissance (en vitrines) et un faible apport de brillance au produit pour certains. Le point faible des leds, c’est leur prix, qui contraint à n’envisager un retour sur investissement qu’à environ trois ans dans le cas d’un simple changement d’ampoules (relamping), et à cinq ans si toute l’installation est refaite. En apparence, tout est donc clair mais, comme le résume Béatrice Querette : « la led, c’est la jungle ». En l’absence de labellisation des ampoules, la pire qualité voisine la meilleure, sans que le prix puisse être retenu comme un critère de choix. Le conseil de professionnels s’avère donc nécessaire pour éviter de mauvaises surprises.
Boutique Aigle : le grand retour des lampes
Mise en avant des sources lumineuses dans le flagship d’Aigle sur le boulevard Saint-Germain, à Paris, chaque « pièce » possédant ses propres lampes. « Nous avons repensé notre concept comme une véritable maison de famille et l’ensemble du mobilier et des suspensions a été chiné » explique Nadine Riberot, responsable agencement et travaux. De fait, les luminaires choisis semblent davantage provenir d’un atelier que d’un appartement, dans la tendance du « soft industriel ». Mais l’objectif est atteint : rappeler l’ancienneté de la marque et rendre la boutique plus chaleureuse. Olivier Bourdeaux, du fabricant Velum, parle de « luminaires structurants », chargés de « ramener l’espace à des proportions humaines en créant des zones ». Et Christian Berre, spécialiste Shoplighting chez Oktalite souligne que « ces lampes ont un rôle seulement décoratif, la mise en valeur des produits reste l’affaire de spots aussi discrets qu’efficaces ».
Boutique Lynx : un peu de ciel en boutique
À l’opposé de la tendance clair-obscur, certaines boutiques (plutôt haut de gamme), comme Lynx à Hasselt, en Belgique, ont opté pour un éclairage aussi naturel que possible. Le principe : une toile translucide tendue au plafond, rétro éclairée par des tubes fluo ou des leds. « La lumière, très homogène, ne crée pas d’ombre sur les articles et préserve le confort visuel des clients » indique Thomas Perrier, du fabricant Barrisol. Pour mettre en valeur les produits, un éclairage d’accentuation est à prévoir en complément.