FashionTech Days 2017 : L’interview d’Annick Jehanne

Les 19-20 octobre prochain, l’événement BtoB Mode et Tech incontournable dans les Hauts de France présentera en avant-première toute l’innovation produit et commerce. Un lieu de networking idéal entre fabricants, distributeurs, créateurs, chercheurs et startups. Rencontre avec Annick Jehanne, au cœur d’un projet en ébullition.

Avoir travaillé dans le secteur de la mode pendant de nombreuses années au sein de marques et de centrales d’achat vous a donné une vue d’ensemble des besoins de ce secteur. Quelles sont vos actions aujourd’hui ?

A.J : Il a quelques années, j’ai décidé de fonder ma propre activité de formation des professionnels de la filière mode et textile, afin de l’amener vers le futur à travers l’innovation et le développement durable. Ce qui m’a amené à diriger aujourd’hui Hubmode, une entreprise de formation. Nous avons lancé une série de MOOC qui permettent à tous les acteurs du secteurs (designers, dirigeants d’entreprises, commerçants indépendants…) de se former au textile ou à la vente. Une autre partie de mon activité est associative. Nous avons cofondé l’association Nordcrea qui rassemble maintenant 50 entreprises dans les Hauts de France. Ensemble, nous construisons des événements comme les FashionTech Days  et d’autres à venir. Nous allons également ouvrir Plateau Fertile, un lieu à Roubaix qui sera à la fois un coworking et un fablab pour les entrepreneurs de la mode sociale et durable. Date prévue d’ouverture, février 2018.

Les FashionTech Days, un pur produit d’intelligence collective pour régénérer le secteur de la mode ?

A.J :  Le nombre de start-ups est en progression cette année au cœur de ces journées. Ce qui correspond à un phénomène. Soudain, nous assistons à une effervescence, une ébullition dans le paysage de la mode. Beaucoup de jeunes, et de moins jeunes d’ailleurs (la Tech n’est pas l’apanage de la jeunesse…), s’intéressent aux problématiques de la chaine de valeur, puisque le système de la mode a beaucoup de mal à dégager des profits. Tout le monde a de plus en plus de mal à « gagner sa vie », et nous sentons qu’il est plus que nécessaire de régénérer ce système. En introduisant une façon différente de créer, produire ou parler au consommateur… Beaucoup d’acteurs réfléchissent à tout cela et arrivent avec des solutions – ou des débuts de solutions, pour remettre le système en état de fonctionnement.

Le programme proposera des keynotes, des démonstrations de nouvelles technologies, des ateliers sur des sujets très pointus. Il nous semble également très important de s’inspirer de ce qu’il se passe ailleurs en Europe. A ce sujet, nous accueillons une délégation de Berlin. En quelques années, l’écosystème de la FashionTech à Berlin a poussé de façon exponentielle. Ils ont une façon de coopérer qui est très intéressante à observer et à comprendre pour nous, les Français, qui avons un peu plus de mal à travailler en groupe.

L’idée est de réunir toute la filière mode dans un seul endroit pendant 2 jours. Pari gagné ?

A.J. : Grandes ou petites, les entreprises doivent absolument être ensemble. C’est la particularité de ce lieu : filateurs, fabricants, grands distributeurs (Camaïeu, Damart, Pimkie, GEMO…), chercheurs, étudiants passionnés… Il y aura aussi une cinquantaine de start- up, voire plus. Nous sommes en train de tenter de pousser les murs, car nous recevons quotidiennement de nouvelles sollicitations et il est forcément très compliqué de faire des choix. On n’aurait presque pas envie d’en faire d‘ailleurs, mais nous y sommes contraints par la superficie des lieux cette année. A voir pour l’année prochaine.
Les grandes entreprises permettent à l’événement d’exister : c’est elles qui le financent très clairement, avec les collectivités publiques. Leur intérêt est clair : sourcer de l’innovation, échanger avec des acteurs de la filière qu’elles ne rencontrent pas régulièrement, et aussi pouvoir prendre la parole. C’est très nouveau ! Et nous sommes contents que ces grandes entreprises acceptent de venir partager leurs démarches d’innovations. Elles se rendent compte que dès qu’elles font un effort de partage, elles ont finalement beaucoup de retours positifs, des opportunités de recruter de nouveaux collaborateurs qui ont soudain une autre image de ces entreprises. Mais attention, tous ceux qui viendront parler ont l’interdiction absolue de parler d’eux-mêmes. On est là pour partager et non pour se vendre. Nous voulons que l’auditoire soit inspiré. Seront privilégiés des formats très courts, percutants. Libre à eux ensuite de se rapprocher pendant les moments d’afterwork.

Bousculer les codes pour financer l’innovation. Vous avez renversé la vapeur ?

A.J. : Quand on démarre un projet, le financement est incontournable. L’ordinaire, c’est le passage obligé des candidats : le pitch devant les investisseurs. Nous allons essayer autre chose. Ce sont les investisseurs qui viendront pitcher pour convaincre en 2 minutes les start-up présentes qu’ils seront capables de les soutenir. Seront présents des banques, des fonds d’investissement, des plates-formes de financement. Plutôt excitant, non ?

Côté financement, des Prix seront également remis pour financer des projets innovants. Parlez-nous de ce programme.

A.J.: Cette année, nous remettrons trois Prix de 1000 € chacun.
Tout d’abord le Hackamode, un événement uniquement B2B. Une vingtaine d’écoles vont proposer 2 ou 3 champions (volontaires) qui travailleront par équipe de 5 issus d’écoles différentes et pendant une journée, sur des sujets donnés par les grandes entreprises. A l’issue de ce temps de coopération, ils pitchent et présentent leurs réflexions aux différents directeurs de l’innovation qui voteront pour leur projet favori. Il y aura aussi le Pitch des Projets, ouvert aux start-up en cours de montage et parrainé par la Société Générale. Enfin, le Coup de cœur durable offert par Eco-TLC, notre partenaire au long cours.

A quelques jours de l’événement, quel est votre sentiment ?

A.J. : Le temps de construction de l’événement s’étale sur 3 ou 4 mois… Et les propositions extérieures se bousculent. De plus en plus de partenaires ont envie d’être présents. Tout peut donc encore bouger jusqu’au dernier moment. L’année dernière, la gagnante du pitch s’est inscrite la veille (Florence Moine – SweetFit). C’était son tout premier pitch. Et elle a gagné ! Nous avons construit un événement très convivial et en même temps très pro, une bulle pour les entreprises. Notre désir le plus cher ? Que les gens se rencontrent, et qu’ils apprennent les uns des autres, comme ce directeur d’innovation (qui venait d’être embauché) et qui m’a confié l’an dernier : « J’ai fait mon MBA d’innovation en 48H ». Tout est là, à chacun de cueillir ce qui lui plait !
Notre rôle est surtout de mettre directement en relation les gens que nous pensons devoir se rencontrer. Un rôle de facilitateur qui nous tient très à cœur !

Propos recueillis par Catherine Dauriac
FashionTech Days 2017
Le rendez-vous B2B de la mode et du textile innovant 

Le 19 et 20 octobre au CETI – Roubaix. 

https://fashiontechdays.fr
@fashiontechday