La distribution en débat au Forum de la Mode

L’une des tables rondes du dernier Forum de la Mode traitait de la révolution numérique de la distribution. Sans délivrer de scénario précis pour le futur, les différents intervenants ont tous témoigné d’un bouleversement profond de cette dernière.

Le 7 novembre dernier, le Forum de la Mode tenait sa troisième édition. Après une brève allocution de Guillaume de Seynes – président du comité stratégique de filière – et la présentation des chiffres 2016 de la mode en France, quatre tables rondes abordaient différents thèmes, tous d’importance majeure. Deuxième sujet du jour, l’influence du digital sur la distribution a passionné la salle.

La boutique en mutation

« Nos vendeurs en boutique sont aussi commissionnés sur leurs ventes sur tablette » – Ulric Jérôme, CEO de matchesfashion.com.

La boutique physique doit demeurer un des maillons essentiels de la distribution. Emma François, fondatrice de la marque Sessùn, rappelait, par exemple, sa volonté de continuer à ouvrir des points de vente. Ulric Jérôme, CEO du site matchesfashion.com, se félicitait de l’inauguration à Londres d’un espace de vente autant que de vie, avec des événements très fréquents. Nicolas Ivars, de la boutique The Next Door à Avignon, annonçait l’ouverture imminente d’une annexe parisienne permettant de donner une image internationale à l’enseigne, dont 50 % des ventes se font encore en réel. « Mais le numérique sera présent en boutique, par exemple sous forme d’écrans pour présenter des produits non exposés en rayon », ajoutait le commerçant. « Nos vendeurs en boutique sont aussi commissionnés sur leurs ventes sur tablette », notifiait Ulric Jérôme. « Les boutiques doivent proposer autant de service que les sites internet, assurait Jean-Bernard Della Chiesa, directeur innovation du groupe Etam. Elles prennent aujourd’hui de nouvelles fonctions, comme celle de posséder des stocks. »

Stratégies internet délicates

« Le numérique sera présent en boutique, par exemple sous forme d’écrans pour présenter des produits non exposés en rayon » – Nicolas Ivars de la boutique The Next Door.

Distributeurs et marques ne peuvent aujourd’hui se passer du canal internet. « 10 % de notre chiffre d’affaires est réalisé sur internet », indiquait Emma François. Toutefois, il convient d’être très prudent sur le web, où les consommateurs semblent plus imprévisibles. « Nous séparons le site image de l’e shop. Les clientes détestent les approches commerciales directes sur internet, déclarait la créatrice. En mars dernier, nous avons lancé notre collection “Sessùn Oui” dédiée au mariage sur internet. Mais nous n’avions pas pensé que les clientes reproduiraient chez elles le rituel du choix de la robe en commandant plusieurs modèles pour leurs essayages. Nous avons eu de très nombreux retours, avec des robes tachées…Nous veillons aussi à ne pas instaurer une concurrence, en interne, entre le personnel en boutique et celui sur le web ». Plus visionnaire, Jean Bernard Della Chiesa insistait sur l’utilisation des données tirées de la digitalisation des actes de vie plutôt qu’uniquement les données commerciales. « Elles permettent de proposer le bon produit au bon moment. Les gens sont d’accord pour partager leurs données privées quand ça leur est utile, relevait l’expert. Cependant marques et distributeurs doivent veiller à garder la main sur leurs fichiers plutôt que ceux-ci ne passent sous le contrôle des Gafa ». A moins qu’il se soit déjà trop tard…