L’Interview de Pierre-François Le Louët, Président de la Fédération Française du Prêt à Porter Féminin

A la tête de la FFPAPF depuis 3 mois, Pierre-François Le Louët présente les actions mises en œuvre depuis son ascension et évoque avec nous ses solutions pour améliorer les relations entre les différents acteurs de la mode.

Vous venez d’accéder à la présidence de la FFPAPF, après en avoir été administrateur à plusieurs reprises. Quel bilan tirez-vous de l’action de la Fédération ces dernières années ?

En premier lieu, je tiens à saluer le travail de mon prédécesseur, Daniel Wertel, qui a effectué tout au long de sa présidence un travail important de modernisation de notre Fédération. Je suis d’ailleurs heureux qu’il ait accepté de continuer à exercer un rôle au sein du nouveau conseil d’administration. En toute logique, ma première mission consiste à consolider les actions déjà entreprises ces dernières années et de les faire davantage connaître. Je pense par exemple à l’aide à l’export, qui permet chaque année à 400 marques françaises d’être représentées à travers le monde. Notamment au Japon, grâce au salon Mode in France, qui fut de nouveau un succès en 2016, puisqu’on a enregistré une hausse de 26 % du nombre d’acheteurs, japonais et coréens majoritairement (1900), pour 70 marques françaises exposées.

Les exportations françaises de prêt-à-porter féminin ont augmenté de 1,2% au premier semestre 2016.

Une réussite qui est en quelque sorte le reflet de l’efficacité de notre politique d’accompagnement du développement des marques à l’international. Les chiffres sont d’ailleurs là pour en attester : les exportations françaises de prêt-à-porter féminin ont augmenté pour la huitième année consécutive au premier semestre 2016, de 1,2%. Préparation du business plan, financement auprès des banques, positionnement de gamme… nous conseillons les entreprises dans de multiples domaines. Une démarche qui les séduit puisque nous organisons en moyenne 200 RDV par an. La création de Traffic, le salon des services dédiés aux marques de mode (prochaine édition le 5&6 avril 2017, au Carreau du Temple à Paris), répond à cette même logique : aider les marques françaises à être performantes à tous les niveaux

Quelles sont les actions que vous souhaitez donc à votre tour entreprendre aujourd’hui ?

A mon arrivée à la tête de la Fédération, nous avons défini 5 priorités pour les 18 mois à venir : l’export, la responsabilité sociétale des entreprises, les nouvelles règles de la distribution wholesale, le financement et enfin la digitalisation des entreprises de mode. Ces 5 thématiques viendront alimenter un cycle de 10 afterworks qui auront lieu tous les mois au siège de la Fédération. Je donne d’ores et déjà rendez-vous aux professionnels du secteur le 24 octobre prochain, à 18h, il y sera question de digital avec Yann Rivoallan, co-fondateur de The Other Store, qui pilote les activités digitales de 30 marques de mode.

« Rejoignez la fédération et venez assister à nos conférences pour participer aux débats »

D’autre part, je pense qu’il faut aujourd’hui défendre notre profession, nos marques, nos entreprises, mais aussi la place de Paris comme Capitale de la Mode. C’est en ce sens que nous avons choisi de nous rapprocher de la Fédération Française de la Couture, du Prêt-à-Porter des Couturiers et des Créateurs de Mode, afin de présenter lors d’une conférence de presse les chiffres clés de l’économie de la mode française. Cette publication montre notamment qu’un million d’emplois sont liés à notre secteur d’activité, pour 150 milliards d’€ de chiffre d’affaires direct. Nous sommes donc en position de nous faire entendre !

Ces très bons chiffres masquent cependant de fortes disparités entre les différents acteurs du marché, et notamment la situation difficile que vivent les indépendants. Des détaillants qui sont d’ailleurs de plus en plus nombreux à pointer du doigt les pratiques commerciales de certains de leurs fournisseurs, notamment la vente en promotion des nouvelles collections sur internet. Comment parvenir aujourd’hui à rétablir une relation de confiance entre ces deux acteurs ?

Tout d’abord il faut rappeler que le secteur de la mode a subi des transformations majeures ces dernières années, qui ont touchées tous les acteurs de la filière, de la fabrication jusque dans la distribution. L’adaptation a donc été difficile pour tout le monde, particulièrement pour les plus petites structures. Dans ce nouveau contexte, et alors que le poids des multimarques dans la distribution a été considérablement réduit au fil du temps, les marques ont dû apprendre à développer leur propre réseau de distribution afin de pouvoir continuer à survivre et grandir. Pour autant, cela ne veut en aucun cas dire que la création de ce réseau doit se faire au détriment de la relation avec les détaillants, qui sont les partenaires historiques des marques. Au contraire ! Les boutiques sont nos alliées, nous avons des relations très étroites avec elles, il ne faut pas l’oublier malgré le contexte parfois tendu. D’autant plus que marques et détaillants, dans leur majorité, recherchent le même but : vendre des collections de qualité au vrai prix. Je peux vous garantir que lorsqu’une griffe distribue sur venteprivée.com ou autre, elle ne le fait jamais avec le sourire ! Aucune marque n’a intérêt à proposer des versions différentes de prix, la coordination avec les différents acteurs du réseau de distribution est donc un enjeu primordial.

« Détaillants et marques de mode doivent rétablir une relation gagnant-gagnant »

D’un autre côté, les multimarques aussi doivent réapprendre à séduire les fournisseurs, et cela passe notamment par prouver qu’ils sont leurs premiers ambassadeurs auprès de leurs clients. Cette démarche peut prendre différentes formes : une vitrine ou un corner en magasin dédié à une marque, l’organisation d’un cocktail pour présenter un nouveau fournisseur, l’invitation du fondateur d’une griffe… Les grands magasins l’ont d’ailleurs bien compris, puisque c’est ce qu’ils font depuis plusieurs années dans le but d’attirer des marques fortes. Et ça fonctionne. 

La représentativité de la profession est aussi en question aujourd’hui. Comment l’améliorer afin de porter plus haut la voix des professionnels de la mode ?

En un mot : regroupement. Les fédérations sont aujourd’hui trop éclatées et ne travaillent pas toujours de concert, il faut que nous nous regroupions afin d’améliorer la représentativité de notre secteur. Nous avons montré que c’est possible à la FFPAPF lors de notre récent rapprochement avec la Fédération de la Couture, et que le changement est positif. Les retombées de notre conférence de presse sur les chiffres de la mode ont d’ailleurs été très importantes, et cela a été possible grâce à ce rapprochement ! Fédérations, associations de commerçants, municipalités… nous devons tous travailler ensemble. Concentrons-nous sur l’avenir et sur ce qui nous rassemble plutôt que sur le passé et nos divergences !

« Les Fédérations doivent se rapprocher pour améliorer la représentativité de notre secteur »

Pour finir, avez-vous un message particulier à adresser aux professionnels du prêt-à-porter féminin ?

Rejoignez la fédération et venez assistez à nos conférences pour participer aux débats. L’union et le rassemblement doivent être nos forces !

Le CV de Pierre-François Le Louët : Diplômé de l’ESCP Europe et de l’IFM, Pierre-François Le Louët, âgé de 42 ans, a débuté sa carrière en tant qu’assistant parlementaire, avant de rejoindre les équipes marketing de L’Oréal en 1998. En 2001, il rejoint l’agence NellyRodi , bureau de tendances et de prospective fondé par sa mère, dont il prend la présidence en 2003. Ce passionné d’art contemporain est également Directeur Exécutif de NellyRodi Japon et Président de sa filiale d’investissement, NellyRodi Money Box. Depuis 2007, il est par ailleurs Administrateur du Syndicat de Paris de la Mode Féminine et a intégré le Conseil d’Administration de la Fédération Française du Prêt à Porter Féminin entre 2007 et 2010 puis à partir de 2013.