Salons, showrooms, agents, groupements… Quelle stratégie pour vos achats ?

Déterminantes pour la pérennité d’un commerce, les périodes d’achats reviennent de plus en plus souvent. Le temps où les détaillants indépendants achetaient deux fois par an est révolu. Place à l’actualisation et au réassort quasi permanent, pour continuer de séduire des clients avides de propositions mode, sans cesse renouvelées.

« Le consommateur veut de la nouveauté : il faut lui en donner ! » résume d’emblée Marc Nécand, consultant pour le commerce indépendant. Style, originalité, innovation, sont aujourd’hui essentiels pour capter l’attention en boutique et dans les vitrines. Concurrence oblige, il faut être réactif et faire preuve d’à propos, pour toujours avoir le bon produit, au bon moment et au meilleur prix. Pour se distinguer, le détaillant doit composer le meilleur assortiment possible, en fonction de sa typologie de clientèle et faire en sorte de l’avoir dans un volume suffisant, afin de gagner en marge. Pour cela, différentes sources d’approvisionnement s’offrent à lui, en fonction de l’implantation et de la taille de son commerce, du grade de qualité à privilégier et du volume de commande, selon que l’on recherche des collections à court ou long terme. Car le « picking » en cours de saison chez les fournisseurs tend à se généraliser et permet de répondre en temps à la demande en boutique. « C’est aussi une manière de signer son offre pour construire une véritable image et développer le bouche à oreille » observe Marc Nécand, qui préconise de « remettre le produit au cœur du métier ». 

Les salons professionnels au cœur de la distribution mode

Espaces privilégiés de rencontres et de découvertes, les salons professionnels sont incontournables. Unité de lieu, variété de l’offre, ils sont d’excellents indicateurs pour les directions d’achats en tout début de saison. L’occasion de rencontrer un maximum de fournisseurs mais aussi (surtout) découvrir de nouvelles marques pour de nouvelles perspectives de vente. Véritables outils d’aide à la décision, le forum de tendances mis en scène par le salon est un concentré d’informations stratégiques pour bien appréhender l’esprit de la saison et établir un pré-choix de pièces incontournables. L’objectif étant de se rassurer et de se conforter dans sa sélection, mais aussi d’optimiser son programme de visites de stands en allant droit à l’essentiel, plan d’achat en main ! Ce qui n’empêche pas les coups de cœur, au détour d’une allée.

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Showrooms et agents de marques cultivent l’exclusivité

Souvent installé dans un quartier prestigieux ou dans un lieu inédit, en accord avec l’identité de la ou des marques qu’il met en scène. Le showroom de vente est un espace sélectif, où les commerciaux reçoivent leurs clients dans un cadre discret, propice aux échanges et à la négociation. Les collections proposées dans leur intégralité sont souvent positionnées dans le moyen/haut de gamme ou la mode créateur. Thierry Denis, gérant des boutiques le Vestiaire d’Uzès (hommes et femme), explique : « Pour nos achats de collections long terme, nous nous déplaçons tous les mois en showrooms mono ou multi- marques. C’est très pratique car nous avons un regard entier et complet sur l’offre. Toujours bien accueillis, le contact est direct et nous pouvons discuter les conditions de paiement plus facilement ». À ce propos, les minima de commande, souvent imposés par les marques, sont un point d’achoppement pour beaucoup de détaillants, comme le souligne Carine Calbo, de la boutique Juste Moi à Agen : « Il est clair que les minimums de commande, que certaines marques exigent, sont un frein à notre décision de travailler avec l’une ou l’autre. Il ne faut pas subir la pression des commerciaux, au risque de multiplier les doublons ou de trop grandes disparités dans les coloramas ». De leur côté, les agents commissionnaires de marques continuent de jouer un rôle fondamental dans la distribution de mode. Hommes et femmes de terrain, ils assurent la visibilité et la promotion des collections dans des showrooms éphémères durant les périodes de vente et de réapprovisionnement, mais aussi à l’occasion de rendez-vous avec les détaillants. Sur le lieu de vente, ils évaluent l’environnement commercial, prodiguent leurs conseils sur les assortiments ainsi que la mise en valeur des produits. Et leur perception du métier ne s’arrête pas au point de vente : « En France, la période des soldes occupe trop de place dans le calendrier et ralentit le renouvellement des collections en boutiques. Il faut habituer l’acheteur professionnel à des prises d’ordres tous les deux mois, pour garantir la pertinence de son offre », souligne Catherine Le Guillous, agent de marques au sein du showroom One O One

La mode est un village

Dans le 2è arrondissement de Paris, le Sentier est le quartier historique de la vente de produits d’habillement et d’accessoires de mode en gros. Boutiques et showrooms de grossistes, fabricants et créateurs, se concentrent autour des rues d’Aboukir, du Caire et Saint-Denis, dans une joyeuse effervescence bigarrée, typique de ce quartier. Malgré les cessations d’activités et la migration de nombreuses entreprises dans des locaux mieux adaptés à proximité de Paris, le Sentier continue de jouer un rôle, avec pour l’essentiel des collections bas/moyenne gamme, en fast fashion, idéales pour combler un manque ou enrichir juste à temps son offre des hits mode de la saison. Autre avantage de poids pour les détaillants, la plupart des entreprises n’imposent aucun minimum de commande. Et, c’est aux portes de Paris, à Aubervilliers, que grossistes et importateurs en vêtements et accessoires se sont progressivement installés. Au CIFA (Centre international de commerce France-asie) et au Fashion Center  on retrouve plus de 500 grossistes, répartis dans de grandes allées multicolores où se succèdent les showrooms. Les prix sont attractifs et l’offre particulièrement vaste. Trop même : difficile de s’y retrouver et de faire son choix parmi les grossistes qui proposent peu ou prou les mêmes produits… mais à des tarifs différents, selon le volume de commande et votre habileté à négocier !

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La Province n’est pas en reste, puisque sur le même modèle, près de 250 entreprises de mode sont implantées rue du Tapis Vert à Marseille et dans les rues adjacentes. Jusqu’à récemment, on y trouvait principalement du prêt-à-porter, mais on compte désormais de nombreux importateurs, chinois pour la plupart, en chaussures et bijoux fantaisie. Enfin dans le 6è arrondissement de Lyon, ils sont environ 200 grossistes vêtements, chaussures, bijoux fantaisie et maroquinerie installés dans les rue Cuvier, Corneille, Viabert et Molière. 

L’Italie, l’autre pays de la mode

Afin de répondre à une demande accrue en Europe pour des réassorts en cours de saison, l’Italie s’est fait une spécialité du « Pronto Moda », avec l’ouverture d’immenses centres d’achats, véritables villes dans la ville. À moins d’un quart d’heure de l’aéroport de Bologne, le Centergross est le pionnier de la vente centralisée de prêt-à-porter aux professionnels. Avec ses 956 000 mètres carrés, ses 240 marques de mode et ses 98 producteurs d’habillement, maroquinerie et accessoires, moyen / haut de gamme, c’est une « ville autonome » bénéficiant de tous les services à proximité (transporteurs, banques, bureau de poste, hôtels, taxi, gare). Une destination « affaires » plébiscitée par de plus en plus de détaillants qui apprécient « le charme de la mode italienne et des relations commerciales plus directes et conviviales » selon Chacha Bensaid, (Giorgio Bellini, Paris). Plus récent, le centre d’achat de C.I.S. di Nola à Naples accueille lui quelques 300 entreprises dans un cadre particulièrement soigné de showrooms totalisant près de 6 km de vitrine où se croisent jusqu’à 20 000 acheteurs professionnels chaque jour. 

L’union fait la force

Pour rester concurrentiel et lutter sur un même plan avec les enseignes, de plus en plus de commerçants s’adossent à un groupement d’achat. Le but : négocier à tarif préférentiel les conditions de vente des articles en grande quantité directement auprès du fournisseur et réaliser des économies d’échelle. Le modèle traditionnel du commerce multimarque semble avoir vécu. En mutualisant leurs ressources et leur savoir-faire respectifs, les détaillants indépendants mettent en commun leurs talents de fin négociateur, bon gestionnaire, ou de bon acheteur au fait des tendances, pour développer leur image de marque et augmenter leur puissance de frappe. Mais aussi optimiser les dépenses et professionnaliser le métier. Ainsi le système proposé par Garant, groupement spécialiste de la chaussure, permet de centraliser les achats des détaillants adhérents et de sécuriser les paiements aux fournisseurs. De même, le réseau Territoire d’Homme propose à ses membres le partage des savoir-faire et la négociation de prestations groupées. En s’appuyant sur ce type de structure, le commerçant dispose de la force économique d’un réseau, sans pour autant compromettre son indépendance : il reste seul maître de ses achats. 

Enfin il ne faut pas négliger les pièces des nouveaux créateurs, afin d’apporter une touche originale ou plus pointue en boutique et mettre en avant le côté différenciant, soit la vraie valeur ajoutée des indépendants.