Nouvelle loi contre l’ultra fast fashion : que contient le texte ?
Le Sénat vient d’adopter la proposition de loi pour freiner l’essor de l’ultra fast fashion, représentée par le géant de la vente en ligne Shein. Une avancée législative à saluer, même si les détaillants attendent des mesures plus fortes.

Plus d’un an après son adoption à l’Assemblée nationale, la proposition de loi « anti fast fashion » a finalement été adoptée à son tour au sénat ce mardi 10 juin, à la quasi-unanimité. « C’est une étape majeure dans la lutte contre l’impact écologique et économique de la fast fashion et l’ultra fast fashion », s’est immédiatement réjouit Agnès Pannier Runacher, ministre de la Transition écologique.
Instauration d’un système de notation pour les entreprises polluantes, publicité interdite, influenceurs sanctionnés… La proposition de loi met en place toute une panoplie d’outils pour lutter contre les géants de la fast fashion. Ou plutôt de l’ultra fast fashion, puisque le texte cible presque uniquement les pures players d’internet, en premier lieu le géant chinois de la vente en ligne Shein. Explications.
Lire aussi : Pourquoi les femmes se rendent toujours en magasin ?
Un malus pouvait atteindre 10 euros par article vendu
Le texte adopté par les sénateurs instaure ainsi en premier lieu une écocontribution versée par les entreprises du secteur de la mode, en fonction de leur impact environnemental. Un système de malus en quelque sorte, qui pourra atteindre 5 € par article en 2025, 6 € en 2026… Et jusqu’à 10 € en 2030 ! Ce qui permettrait de réduire l’écart de prix entre les produits issus de l’ultra fast fashion et ceux issus de filières dites plus vertueuses.
Toute la question sera alors de définir les entreprises concernées. Si pour le moment aucun critère précis n’a été évoqué, une chose est certaine, les acteurs traditionnels de la fast fashion, à l’instar de Primark, Zara ou H&M, ne devraient pas être pénalisés par les mesures adoptées au palais du Luxembourg. « Je ne souhaite pas faire payer un euro aux entreprises qui disposent d’enseignes en France et qui contribuent ainsi à la vitalité économique de nos territoires », a d’ailleurs confirmé la sénatrice Les Républicains Sylvie Valente Le Hir, rapporteuse du texte.
Seuls les pures players d’internet seraient ainsi concernés, et en première ligne l’entreprise chinoise Shein, qui s’est positionnée en seulement quelques années comme l’un des leaders de la vente de produits de mode en France. « On se retrouve finalement avec une loi anti-Shein, et anti-clients de Shein. Cette loi, si elle vient à passer, pénalisera directement le portefeuille de nos clients et réduira drastiquement leur pouvoir d’achat », dénonce Quentin Ruffat, porte-parole de Shein en France.
Taxations des « petits colis » et interdiction de publicite
Mais ce n’est pas tout. En complément de ce système de malus, la sénat a voté l’instauration d’une taxe allant entre deux et quatre euros sur les petits colis (moins de 150 euros) livrés par des entreprises établies hors de l’Union européenne. Une extension du périmètre qui permet également de sanctionner économiquement Temu, l’autre poids lourd asiatique de la vente en ligne.
Troisième mesure phare de cette loi, l’interdiction complète de publicité pour les entreprises de l’ultra fast fashion, assortie de sanctions ciblant les influenceurs qui voudraient en faire la promotion. Une mesure dont la constitutionnalité fait toutefois débat. Ce sera justement le sujet de la Commission Mixte Paritaire (CMP), réunissant sénateurs et députés, qui sera convoquée à la rentrée afin d’aboutir à un texte commun, préalable à l’adoption définitive de cette loi.
Une avancée saluée par les fédérations de commerçants, qui en attendent plus
« Pour la première fois, une loi française nomme clairement le danger que représente le modèle industriel de plateformes telles que Shein ou Temu. Que ce soit d’un point de vue environnemental, économique ou encore social. C’est une avancée majeure pour tous les commerces des centres-villes. En effet, ils sont les premiers à subir ce système que ce soit par l’écrasement des marges, la saisonnalité bousculée ou encore la désertification des flux », s’est félicité Pierre Talamon, président de la Fédération Nationale de l’Habillement (FNH), suite à l’adoption du texte par le Sénat.
Si une étape semble franchie, les commerçants indépendants attendent néanmoins des mesures plus fortes, et notamment le « blocage pur et simple » des plateformes Shein et Temu. « Ces plateformes éludent la TVA, échappent aux droits de douane, contournent les périodes de soldes, violent les règles d’étiquetage et de transparence commerciale. Elles tirent un avantage concurrentiel déloyal au détriment des commerçants français, des marketplaces responsables, des PME qui investissent dans la conformité. Le principe de loyauté des transactions commerciales, pourtant inscrit dans le Code de la consommation, est piétiné. Cette distorsion de concurrence est insoutenable et économiquement destructrice », dénonce à juste titre la Confédération des Commerçants de France (CDF).
Lire aussi : Comment améliorer la présentation de votre offre en boutique ?
Le temps presse, d’après une analyse réalisée par l’AFP du 22 mai au 5 juin, 7 220 nouvelles références de vêtements et chaussures sont recensées en moyenne sur le site Shein… Chaque jour !